De Rerum Natura
Dans ce poème didactique en vers (haxamètre dactyliques), le poète latin Lucrèce délivre à son correspondant Memmius les principes de la philosophie épicurienne. Au début du chant II, il évoque le bonheur selon Épicure.
Texte :
Douceur, lorsque les vents soulèvent la mère immense,
d'observer du rivage le dur effort d'autrui,
non que le tourment soit jamai sun douc plaisir
mais il nous plaît de voir à quoi nous échappons.
Lors des grands combats de guerre, il plaît aussi
de regarder sans risque les armées dans les plaines.
Mais rien n'est plus doux que d'habiter les hauts lieux
fortifiés solidement par le savoir des sages,
temples de sérénité d'où l'on peut voir les autres
erret sans trêve en bas, cherchant le chemin de la vie,
rivalisant de talent, de gloire nobiliaire,
s'efforçant nuit et jour par un labeur intense
d'atteindre l'opulence, au faîte du pouvoir.
Pitoyables esprits, coeur aveugles des hommes !
Dans quelles ténèbres mortelles, quels dangers
passe leur peu de vie ! Ne voient-ils pas l'évidence ?
La nature en criant ne réclame rien d'autre
sinon que la douleur soit éloignée du corps,
que l'esprit jouisse de sensations heureuses,
délivré des soucis et de crainte affranchi.
Ainsi nous le voyons, bien peu de choses sont nécessaires
à la nature corporelle et tout ce qui ôte la douleur
peut aussi nous donner maintes délices en échange.
Il est parfois plus agréable, et la nature est satisfaite,
si l'on ne possède statues dorées d'éphèbes
tenant en main droite des flambeaux allumés
pour fournir leur lumière aux nocturnes festins,
ni maison brillant d'or et reluisant d'argent,
ni cithares résonnant sous des lambris dorés,
de pouvoir entre amis, couchés dans l'herbe tendre,
auprès d'une rivière, sous les branches d'un grand arbre,
choyer allégrement son corps à peu de frais,
surtout quand le temps sourit et que la saison
parsème de mille fleurs les prairies verdissantes.
Et les f!èvres ne quittent pas plus vite les corps
si l'on s'agite sur de riche brocards de pourpre
que si l'on doit coucher sur un drap plébéien.
Étude de texte
→ Poème didactique (s'adresse ici à Memmius) en héxamètres dactyliques
Le texte est divisé en trois parties distinctes:
- 1ère partie - (v.1 à 15) : Le sage Epicurien se tient à l'écart, il observe les hommes.
Les verbes de perception "observer", "regarder", "voir", montrent qu'il n'est que simple spectateur, il ne prend pas part à l'agitation générale
→ Les hommes, ignorants et pris par leurs occupations, ne sont pas conscients de leurs erreurs. Les Epicuriens sont dans la clairvoyance, cela les force à vivre dans l'isolement
→ Notion d'Ataraxie
- 2ème partie - (v.16 à 23) : Le respect des exigences de la nature
Récurrence + Champ lexical de la nature "herbe tendre", "rivière", "branches", "arbre", "fleurs", "plaines"
Lucrèce décrit ici un Locus Amoenus
→ Les plaisirs les plus importants sont les plaisirs naturels qui satisfont le corps, entraînant le respect de la nature
- 3ème partie - (v.24 à 37) : Se défaire des plaisirs superflus
La richesse et le luxe proposent un bonheur illusoire.
Champ lexical de la richesse "Statue dorée", "Flambeau", "Maison brilliant d'or", "dorés", "riches brocards"
→ Soutien de la Frugalité
→ Blâme de l'unitilité et de la vacuité des richesses tant recherchées