Le Mariage de Figaro

03/06/2017

Le Mariage de Figaro, Beaumarchais -

La Folle Journée, ou le Mariage de Figaro est une comédie en cinq petits actes de Beaumarchais écrite en 1778 dont la première représentation officielle a eut lieu le 27 avril 1784 au théâtre Odéon, après plusieurs années de censure (soit 6 ans plus tard).

Beaumarchais y remet en scène les principaux personnages de sa pièce La Barbier de Séville ou la Précaution inutile (1775). Une troisième pièce viendra clore la trilogie en 1792 : L'Autre Tartuffe, ou la Mère Coupable.

La bataille du mariage de Figaro, la pièce est considérée comme subversive, (=remet en cause la légitimité de l'autorité) et le roi a d'abord interdit sa représentation. Il fallut quatre ans pour faire revenir le souverain sur sa décision, et pour que cette comédie soit enfin portée à la scène, le 27 avril 1784. La pièce triomphe ensuite de 1784 à 1787

Le Mariage de Figaro incarne l'esprit philosophique au théâtre, car le personnage de Figaro conteste les valeurs de l'Ancien Régime. En effet, Figaro s'attaque aux privilèges de la noblesse à travers un conflit d'ordre privé (conflit amoureux) qui l'oppose à son maître. Le rétablissement du « droit de cuissage », que le Comte tente de négocier par l'argent et le chantage, est à la fois le moteur de l'action et le symbole de la tyrannie exercée par les puissants sur leurs inférieurs.

La pièce est alors :

  • Une comédie
  • Une satire sociale

L'extrait étudié présente le monologue du personnage principal dans le dernier acte de la pièce. Figaro se croit trahi par Suzanne et pense que celle-ci veut le quitter pour le Comte Almaviva, son maître, car il est d'un rang plus élevé.

En quoi ce monologue est-il une satire de la société et du pouvoir caractéristique de l'évolution des rapports maître/valet dans le théâtre du XVIIIème siècle ?

I - La vivacité du monologue


A) Ce monologue correspond à un moment de crise

Ce monologue est relié à l'intrigue, il est alors justifié voire motivé dans la pièce. Un certain réalisme est donné dans la pièce par des situations :

  • Figaro interromps son monologue quand il croit entendre arriver Suzanne
  • Il guette l'arrivée de Suzanne pour la surprendre → justifie son isolement

Cette agitation intérieure se traduit par une agitation physique → les didascalies viennent rythmer voire ponctuer son discours. On remarque notamment qu'après chaque didascalie, le personnage change de sujet dans son discours idée de désordre qui dissimule en réalité une organisation rigoureuse de son discours :

  • Du début jusqu'à « Il s'assied sur un banc »Mise en opposition du Comte avec Figaro - Parole adressée
  • De « Il s'assied sur un banc » jusqu'à « il se lève »Récit de la destinée de Figaro - Introspection
  • De « il se lève » jusqu'à « il se rassied »Défense de la liberté d'expression
  • De « il se rassied » jusqu'à la fin → Reprise du récit, Figaro confronté à la censure

B) Indignation et colère de Figaro

Tout d'abord, la dénonciation se fait sur un ton indigné qui fait éclater au jour la colère du valet :

  • Usage de phrases exclamatives « parce que vous êtes un grand seigneur, vous vous croyez un grand génie ! » ; « tout cela rend si fier ! » ; « du reste homme ordinaire ! tandis que moi, morbleu ! » → révèle la colère du locuteur
  • Juron « morbleu » → signifie « mort de dieu » mais puisqu'à l'époque il est interdit de nommer dieu dans un juron, sous peine de blasphème, on modifie le terme pour donner « morbleu »
  • Énumérations « noblesse, fortune, un rang, des places » ; « la Perse, une partie de la presqu'île de l'Inde, toute l'Egypte, les royaumes de Barca, de Tripoli, de Tunis, d'Alger et de Maroc » rythme rapide, haletant : débordement, indignation
  • Asyndètes « Mes joues creusaient, mon terme était échu : je voyais de loin arriver l'affreux recors, la plume fichée dans sa perruque : en frémissant je m'évertue »rythme échevelé qui illustre le désordre et la rapidité du personnage
  • Interruptions dans le discours matérialisées par des points de suspension « un grand génie !... noblesse, fortune » « et vous voulez jouter... On vient... c'est elle... ce n'est personne »émotion du personnage
  • Expressions familières « morbleu » ; « chiens de chrétiens » colère du personnage

Transition : Ce monologue est donc le reflet des sentiments de Figaro face à l'injustice du monde, et l'occasion pour lui de revenir sur le parcours de la vie difficile qui est le sien.

II - Le récit de vie d'un héros picaresque confronté à une société dont il fait la satire


A) Le personnage de Figaro, un héros picaresque

Figaro ignore ses véritables origines (préparation du coup de théâtre à venir), élevé par des bandits, il refuse la fatalité de sa destinée qu'il qualifie de « bizarre »déterminisme, le destin de Figaro semble défini, déterminé par son éducation : « fils de je ne sais quoi » ; « volé » ; « bandit » ; « élevé dans leurs mœurs » (→ mépris dans la formulation) → vocabulaire péjoratif, décrit une classe sociale et des origines défavorables. Figaro appartient à la catégorie des exclus, des vagabonds, des marginaux « partout je suis repoussé »rang social très bas. 

La naissance qui est la sienne le condmane socialement → tentative de s'échapper à ce determinisme

B) La satire de la société

La réussite sociale ne semble pas dépendre du talent ou de la moral des gens, mais bien de leur naissance : "vous vous êtes donné la peine de naître". 

Ce texte est tout d'abord une critique de la censure, la censure s'exprime contre Figaro à plusieurs reprises.

  • Vocabulaire péjoratif : Portrait polémique des Princes Mahométans qui pratiquent la censure « un envoyé... de je ne sais où » ; « dont pas un, je crois, ne sait lire, et qui nous meurtrissent l'omoplate en nous disant : chiens de chrétiens ! »l'insulte mahométane prouve l'intolérance des musulmans, ces derniers censurent sans connaître le contenu de la pièce écrite par Figaro, enfin ils sont violents.
  • Énumération des pays que Figaro est censé avoir offensé « presqu'île de l'Inde, toute l'Égypte, les royaumes de Barca, de Tripoli, de Tunis, d'Alger et de Maroc »expression hyperbolique car l'ensemble de l'Empire Ottoman se sent concerné. Décalage entre l'effet et la cause : disproportion dans les réactions
  • Expression hyperbolique par l'anaphore du « ni » dans « pourvu que je ne parle dans mes écrits ni de l'autorité, ni du culte, ni de la politique, ni de la morale, ni des gens en place, ni des corps en crédit, ni de l'Opéra, ni des autres spectacles, ni de personne qui tienne à quelque chose » → c'est l'anaphore qui permet l'hyperbole. Il liste les interdits des écrivains (interdits de parler du pouvoir, de la religion, de l'économie et des arts). Le dernier élément apparaît comme une gradation, c'est une forme d'excès : on ne peut écrire sur rien 
  • Antithèses « je puis tout imprimer librement »« deux ou trois censeurs »
  • Antiphrase « douce liberté » → ironie, dénonce le manque de liberté
  • Oxymore « journal inutile »
  • Euphémisme évoquant la prison « château fort »Figaro n'est pas libre de ses paroles
  • Mécanisme absurde de répétition « Et voilà ma comédie flambée » ; « sitôt je vois » ; « me voilà derechef sans emploi » → à chaque fois le déterminisme le fait échouer, les expressions montrent la rapidité de la censure: mécanisme qui donne de la logique au texte, à chaque tentative se suit un échec → Déterminisme

Les raisons pour lesquelles s'exercent la censure sont obscures : ignorance des princes mahométans, voire aucune raison, elle ne repose sur rien et est réalisée avec violence :

  • Violence verbale : injures
  • Violence physique "meurtrir"

Derrière Figaro se trouve la figure de Beaumarchais par Double énonciation, On sait notamment que Beaumarchais a subi la censure et l'emprisonnement

La satire de la société se fait également par une critique des aristocrates : les grands, les puissants sont la cible de Figaro.

  • Pronom indéfini « on » pour les désigner → masse de personnes obscures, indéfinies, agissant dans l'ombre
  • Utilisation du registre polémique « un de ces puissants de quatre jours » → évocation de leurs privilèges éphémères ; « cuvé de son orgueil » → la justice repose sur la vanité des grands qui veulent que les plus petits sentent que leur pouvoir est absolu et qu'il peut s'exercer quand bon leur souhaite
  • Complément circonstanciel de temps « un jour dans la rue » → caprice de la justice
  • Jeu de mots « il n'y a que les petits hommes qui redoutent les petits écrits » → « petit » à prendre au sens moral

Figaro en vient jusqu'à attaquer l'ignorance des gens du monde « il n'est pas nécessaire de tenir les choses pour en raisonner » et leur malhonnêteté « les personnes dites "comme il faut" m'ouvrent.. les trois quarts du profit » :

  • Citation « comme il faut » → la réputation est fondée sur les ouïes dires, les apparences.
  • Contradiction flagrante « chacun pillait en exigeant de moi que je fusse honnête » → achève de dresser un portrait affligeant des puissants

Figaro va donc dénoncer l'existence des privièges qui sont, selon lui, lié à l'orgueil et à la vanté des grands de ce monde qui pensent que leur pouvoir est intemporel. Mais en réalité, seul le pouvoir divin est intemporel, celui qui concerne les humains est soumis au temps, il n'est qu'éphémère. 

Sa critique va s'appuyer sur une comparaison entre lui et le Conte Almaviva : le conflit amoureux qi les oppose va permettre de développer la critique des grands de ce monde.

Figaro oppose le pouvoir de la naissance à son propre mérite. Selon lui, la hiérarchie est cloisonnée, la domination ne repose donc que sur la naissance 

Qu'avez-vous fait pour tant de biens ? Vous vous êtes donné la peine de naître, et rien de plus !

- Figaro

Il montre que le pouvoir ne repose ni sur le talent, ni sur le mérite ou les actions, il dénonce la passivité des puissants :

  • Tournures restrictives "ne..que"mise en évidence de l'absence de talent des aristocrates, il n'ont aucunes raisons de posséder de pouvoir et de la domination

En opposition, il met en valeur ses propres talents qui reposent sur le mérite, il met en évidence ses talents, ses efforts et le travail qu'il fournit 

→ Son exemple et celui du conte d'Almaviva sont représentatifs de la façon dont la société est sclérosée. Derrière Figaro se cache en réalité la figure de Beaumarchais qui part le principe de double énonciation va dénoncer la hierarchisation sociale du XVIIIème siècle

Conclusion

C'est donc un monologue présenté dans un moment de crise émotionelle lié à l'intrigue qui exprime la rancoeur du personnage vis à vis de la société qui autorise cette domination injustifiée. L'extrait apparaît alors comme une satire du fonctionnement social par le détour de l'intrigue amoureuse. 

C'est un texte appartenant au registre polémique puisqu'il dénonce la puissance des aristocrates et la société du XVIIIème siècle. 

Beaumarchais va beaucoup plus loin que la simple satire, il remet en question l'entiereté de la société. Selon lui, l'évolution du couple maître/valet au théâtre reflète parfaitement les lumières du XVIIIème siècle.

Ouverture :

  • Dom Juan, Molière - Dans le texte de Beaumarchais on note l'absence totale d'admiration, de complémentarité ou de complicité du valet envers son mapitre contrairement à Molière. 
  • Ruy Blas, Victor Hugo - Opposition entre le maître et le valet, rivalité + affrontement + idée de satire sociale
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